Prep en ville: Témoignages de prepeurs et de médecins

Prep en ville: Témoignages de prepeurs et de médecins

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La Prep chez le médecin généraliste ou “en ville” (par opposition à l’hôpital), comment ça se passe? Nous avons interrogé nouveaux prepeurs et médecins.

Laurent, 43 ans, Bordeaux
Célibataire, avec une vie sexuelle active, Laurent envisage d’arrêter la capote avec certains de ses amants réguliers. Ils ont donc réfléchi à prendre la Prep.
Ayant entendu que les médecins généralistes allaient pouvoir prescrire la Prep,  le bordelais a évoqué le sujet avec son médecin traitant en début d’année: “On avait discuté du protocole, des possibles interactions avec d’autres traitements, des effets secondaires, du suivi, ce genre de choses.”
Il a pris rendez-vous en juin dernier:  “J’ai passé des tests afin de contrôler mon statut sérologique ainsi que des possibles traces d’IST et tous les tests sont revenus négatifs mis à part un gonocoque dans la gorge. Pour faire disparaître cette bactérie, une injection dans la fesse et c’était réglé.” Il a eu ensuite sa prescription et a commencé la Prep en continu, qu’il prend “tous les matins au petit déj”.
Jusqu’ici, il n’avait pas sauté le pas car il imaginait “sûrement à tort”, précise-t-il, “que les démarches étaient longues et fastidieuses.” “Le cabinet de mon médecin est à moins de deux kilomètres de chez moi, je le connaissais déjà et j’avais confiance en lui alors ça m’a semblé plus simple de voir avec lui.”, explique-t-il.
Son médecin, ajoute-t-il, « s’informe à la fois par la littérature médicale mais aussi par des publications éditées par des structures telles que Aides. »
Aujourd’hui il se dit “ravi de prendre ce traitement. “Je sais que je suis protégé contre le VIH et j’ai un suivi tous les 3 mois avec des tests complets et je dois m’y tenir si je veux avoir un renouvellement d’ordonnance. On a aussi profité de cette prescription Prep pour faire tous mes rappels de vaccins: hépatite, papillomavirus, tétanos, etc.”

Baptiste, 34 ans, Toulouse
Baptiste a souhaité se mettre à la Prep il y a quelques mois. “J’ai eu deux prises de risque cette année », nous explique-t-il. « Et comme beaucoup d’hommes gays, le VIH et les IST sont une source d’angoisse assez importante dans notre quotidien. Je me suis dit que c’était le bon moment pour commencer la Prep.”
Si jusqu’ici il n’avait pas souhaité changer sa prévention, c’est avant tout parce qu’il était réticent à prendre un médicament: “Prendre un médicament, tous les jours ou non, c’est une contrainte, dit-il. Il faut y penser. Je n’étais pas hyper emballé à l’idée de prendre un cachet tous les jours.”
Militant à Act Up-Sud Ouest, donc très informé sur le sujet, il a quasiment dû former son médecin traitant: “Il m’a dit que j’étais la deuxième personne qui le lui demandait et qu’il n’avait aucune info. C’est quasiment moi qui lui ai dit quoi faire. Il ne connaissait même pas le nom de la molécule, j’ai dû lui dire la posologie, qu’il fallait prescrire un bilan de dépistage complet.”
Baptiste serait étonné que son médecin fasse une formation particulière sur le sujet.“Je ne pense pas qu’il va se former, regrette-t-il. Je lui ai donné des infos, je crois qu’il en a pris note.” “C’est dommage parce que j’imagine un jeune homme de 20 ans qui vient voir ce médecin et qui n’y connaît rien, c’est dangereux”, conclut-il.

Dr Q., Paris
Diplômé depuis novembre 2020, Dr Q. exerce aux urgences et dans un centre de santé du XXè.
Il effectuait déjà le suivi Prep des patients avant le mois de juin, qui lui étaient envoyés par le 190. “La santé sexuelle est un sujet qui m’intéresse particulièrement. Je fais aussi de la gynéco, de l’IVG” C’est un sujet parfois compliqué à aborder parce que certains ont de mauvaises expériences avec des médecins qui sont dans le jugement. Je lutte contre ça.”
Il a prescrit à une quarantaine de patients depuis juin. Une centaine depuis novembre. Ils viennent par le bouche à oreille. Il continue à « récupérer » les patients du 190 ou de Saint-Louis, qui sont “saturés”. Pour que les choses soient claires, sur son Doctolib il a une case “première inscription Prep”.
La grande majorité des patients qu’il suit étaient déjà très informés sur la prophylaxie pré-exposition et sont venus le voir spécifiquement pour ça. “J’ai deux travailleurs du sexe et un homme d’afrique sub sahariennes. Ceux-là, c’est moi qui leur ai proposé. Les deux travailleurs du sexe n’étaient pas trop au courant.”
Il demande un peu d’indulgence pour les médecins généralistes qui ne connaissent pas grand chose à la Prep. “Quand tu es médecin généraliste, tu vois des patients de tous horizons, tu ne peux pas te spécialiser dans tous les domaines. Certains médecins ne voient peut-être que un ou deux patients LGBT par an.”
Pour lui, l’une des solutions pour motiver ces médecins c’est la télé-médecine. Il s’explique: “Un patient m’a envoyé par mail un résultat positif à une IST. Je vais lui envoyer une prescription, mais ce n’est pas un acte que je vais valoriser. La télé-médecine est vraiment cruciale pour que les médecins généralistes s’intéressent à la Prep. Le suivi est important et si tu peux en plus valoriser ces actes-là, les médecins sont contents. Si tu t’intéresses et te forme à un sujet qui touche peut-être 1% de tes patients, il faut que ce soit valorisé d’un point de vue financier. ”

Dr L., Nantes
Dr L. consulte dans la banlieue de Nantes. Elle n’a prescrit pour l’instant la Prep qu’à un seul patient, qu’elle suit depuis plusieurs années pour des ordonnances de bilans IST.
Elle nous raconte: “Il vient aussi régulièrement car il est inquiet de différentes lésions qu’il pourrait avoir au niveau buccal ou ano-génital.  On a fini par discuter de son anxiété, et au final de sa sexualité. En couple depuis quelques années, il envisage avec son compagnon de sortir un peu de la routine de couple, et d’avoir des rapports extra conjugaux.  Mais comme il se sait très inquiet et un peu « hypocondriaque » (je reprends ses termes), il n’ose pas franchir le pas.  Un jour, il évoque la Prep, mais pense que ce n’est pas pour lui car ses rapports extra-conjugaux risquent de survenir « par phases », et pas en continu. Je lui dis que je me renseigne, et que je le rappelle.”
Elle n’est pas formée sur la question. “J’avais vu passer des infos sur la Prep sur le twitter médical, au moment de l’autorisation de la prescription par les médecins généralistes.  J’ai donc lancé un appel et là, un twittos m’a donné pas mal de ressources, pour les patients, pour les prescripteurs, etc.”
“J’ai rappelé mon patient, qui est revenu en consultation après quelques semaines, et on a organisé la prescription et la surveillance biologique ensemble.”
“Mon patient semble satisfait, estime le Dr L.  Il revient tous les 3 mois pour le moment (ça fait 6 mois qu’on a commencé à en parler), la Prep le rassure.”
Pour ses autres patients, la médecin indique qu’elle n’a “pas encore le réflexe.” “Je pense à aborder la question quand on me demande un bilan IST, mais pas sinon”, précise-t-elle.
D’abord parce que la sexualité n’est pas systématiquement abordée.  Je le fais maintenant pour tous mes nouveaux patients (…). En général lors d’une première consultation les gens passent vite sur le sujet, mais au moins ils savent que la question a été posée et qu’on peut y revenir. En revanche pour les patients que j’ai « récupérés » en m’installant, je n’avais pas encore ce réflexe, et ça me parait plus difficile d’aborder la question maintenant (à tort certainement ?). Ensuite parce qu’en tant que médecin « de famille », beaucoup ont peur que les infos circulent (alors que nous sommes tenus au secret, même au sein d’un couple/d’une famille/d’une fratrie etc.)”

LIRE AUSSI | La PrEP chez un médecin généraliste, comment ça marche?

 

Cet article est rédigé par Hornet dans le cadre d’une campagne de Santé publique France.
Retrouvez toutes les infos sur la prévention sur http://sexosafe.fr/

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